Triste article de monsieur Laurent Valdiguié dans « le journal du dimanche" de ce jour (1). Pas triste parce qu’il donne 3 raisons le lire le livre de Valérie Trierweiler. Pas triste non plus parce qu’il dénonce ce qu’il appelle une « fatwa » qui pèse sur ce livre. De ce point de vue, je suis d’accord avec lui. Imaginer un mouvement de résistance qui s’appuierait sur un refus de vendre ou d’acheter le livre, est absurde, contre-productif et contraire à l’idée que je me fais de la démocratie. A partir du moment où il est sorti, ce bouquin doit être disponible pour ceux qui veulent l’acheter. Acheter, ne pas acheter, lire ou ne pas lire le livre relève de choix individuels, et de rien d’autre. Je dirais simplement qu’il est probablement dommage que d’autres livres ne bénéficient pas d’une telle publicité à leur sortie. On va me répondre que c’est la loi du marché. C’est la loi de l’offre et de la demande. Certes mais je ne suis tout de même pas naïf au point de croire que le marché est une science exacte. Il y a des demandes qui font l’objet de fortes stimulations, pour permettre à l’offre de se développer.
Revenons au triste article de monsieur Laurent Valdiguié, rédacteur en chef adjoint du JDD. C’est un triste article au motif que, se voulant politique, il est en quelque sorte anti-politique, au sens où politique renvoie à l’organisation de la vie de la cité, de la vie en société. Cet article ne parle pas de cela. Il est ailleurs.
Triste article quand Laurent Valdiguié dénonce une « Fatwa » pour en lancer une autre aussitôt. C’est une technique bien connue et habilement pratiquée par tous ceux qui se sentent détenteur d’une vérité.
Il s’en prend à juste titre à ceux qui veulent créer un cordon sanitaire pour que le livre ni ne se vende ni ne se lise. En même temps, le ton de son article laisse penser que ceux qui ne liraient pas le livre, passeraient à côté d’un élément fondamental pour la compréhension de la crise que nous sommes en train de vivre.
Triste article quand l’analyse de l’action d’un responsable politique, se fait à partir du récit d’une personne qui a été proche de l’Homme politique en question.
Que celui-ci se nomme François Hollande, Nicolas Sarkozy, qu’il exerce une fonction de Président de la république ou de premier ministre ou de ministres ou de maire…, son action s’analyse d’abord à partir des faits et pas de jugements personnels de la part des personnes qui sont proches des responsables. Apparemment Laurent Valdiguié n’est pas un adepte de cette démarche. Il faut dire que c’est un travail autrement plus ardu que de surfer sur la vague. Il faut analyser les actions et ce qu’elles produisent sur les populations concernées par les actions, sur la cité, sur le vivre ensemble… Probablement trop compliqué. Pour Alain Valdiguié, le jugement est sans appel, ce que dit Valérie Trierweiler sur François Hollande est le seul, le vrai l’unique visage de François Hollande.
Triste article d’une rubrique politique qui vient nourrir encore un peu plus la défiance au politique. Non pas qu’il faille cacher, pour se protéger en prétextant que c’est en cachant que nous pourrons renouer avec la confiance en l’action politique. Mais l’action politique est une action collective qui nécessite des mobilisations collectives de la société civile. Les idées politiques ne peuvent vraiment se traduire dans la réalité que par la force, ou par l’action qui conjugue actions et décisions politiques avec une participation collective d’individus qui ont réussi à trouver des compromis entre eux pour avancer ensemble. C’est ce qui caractérise les démocraties et notamment la nôtre, que nous devons conforter. Mais aujourd’hui, ce n’est pas seulement l’action politique qui est en crise c’est tout ce système qui permet que l’on vive en démocratie qui est en crise. Les vecteurs permettant la réalisation de compromis entre citoyens sont à réinventer. Nous vivons en effet dans une période où les mobilisations « pour dénoncer » sont encore nombreuses. La fête de l’Huma de ce Weekend, montre que l’on peut se rassembler pour dénoncer, sans pour autant » proposer » en dehors des postures de tribunes. Ces mobilisations sont utiles et indispensables. Les mobilisations « pour proposer » sont beaucoup plus rares. Et pourtant elles aussi sont utiles et indispensables.
C’est une question centrale, qui fait l’objet de réflexions importantes. Des articles ou des « points de vue » dans de nombreux journaux se font l’échos de ces réflexions qui interrogent tous les citoyens que nous sommes, pour mieux participer à notre façon de vivre ensemble et ainsi alimenter l’action politique.
Analyser l’action politique du plus haut responsable de notre république, à la lecture du livre de celle qui fut sa compagne quelques années, et en tirer la conclusion qu’il faut absolument le lire, est pour le moins triste.
L'article du directeur adjoint du JDD sur la même page "La confusion des sentiments" remet un peu les choses en place en notant, à propos du livre, la confusion permanente entre le sphère privée et la sphère publique, précisant que Valérie Trierweiler joue en permanence sur la confusion "entre le récit vengeur d'une femme quittée et le reportage dans les coulisses du pouvoir". Voilà qui éclaire sous un autre jour cet événement que constitue la sortie du livre.
Ceci n'empêche pas une question: Une telle publicité du livre dans un article écrit par le rédacteur en chef adjoint d'un journal qui appartient au même groupe que Paris Match dans lequel travaille Valérie Trierweiler, ne constitue telle-pas un conflit d'intérêt ? C'est une question qui mérite d'être posée.
Gaby Bonnand
1 "Le miroir trouble de ses années Hollande: 3 raisons de lire les livre "Merci pour ce moment" de Valérie Trierweiler"