La gauche progressiste est fracturée. Au-delà de la personnalité des 2 candidats que sont Macron et Hamon, je constate avec effarement que nous, citoyens se reconnaissant dans une gauche réformatrice et progressiste, sommes soumis à une première obligation qui est de choisir son camp, Macron ou Hamon , puis à une deuxième qui consiste à caricaturer le camp que nous n’avons pas choisi.
Je veux tout d’abord souligner l’immense responsabilité du Parti Socialiste, dans la situation que nous vivons. Incapable, durant tout le mandat d’avoir su organiser des débats dans la sérénité, laissant ainsi des oppositions s’organisée au sein de la majorité, jusqu’à la caricature, il a été également inexistant dans un rôle d’éclairage des choix de l’exécutif. Rôle qui, s’il avait été joué, aurait empêché peut-être l’exécutif de se fourvoyer dans la proposition de la déchéance de la nationalité, option qui a fait tant de mal.
Mais non, le Parti Socialiste était ailleurs. Absent du terrain de la conduite d’une majorité durant un mandat, il a laissé des logiques se développer qui ont conduit à la situation que nous connaissons aujourd’hui.
2 hommes, tous les 2 ayant été ministres de François HOLLANDE, sont candidats. Tous les 2, qu’on le veuille ou non, et contre tout ce qui peut être dit dans les 2 camps, drainent derrière eux, des milliers de citoyens se reconnaissant dans une gauche réformatrice et progressiste.
Dans cette compétition qu’est la présidentielle, cette situation est catastrophique. Il suffit de décrypter aujourd’hui la stratégie des 2 candidats, dans un espace laissé en friche par le Parti Socialiste qui ne sait plus s’il est spectateur, arbitre ou senseur.
Pendant que Hamon pousse son avantage pour demander à la direction du Parti Socialiste, (lequel a été incapable de gérer les frondeurs de manière responsable sous le quinquennat), d’être sans concession avec ceux qui se rallient à Macron, ce dernier n’en finit pas de parler des législatives comme si il s’agissait d’organiser, sous la houlette de En Marche, « l’entreprise France » avec Macron pour Patron, dans la perspective d’une victoire de ce dernier.
Pendant que Macron, restreignant la société civile à son mouvement En Marche, ne cesse de répéter que les candidatures feront l’objet d’un travail très pointu de la part de la commission d’investitures, ignorant au passage les dynamiques locales, Benoit Hamon qui a superbement ignoré la majorité du Parti socialiste depuis sa victoire au primaire, ne cesse de dénoncer Macron comme étant le marchepied de Marine Le Pen.
Gouverner un pays ce n’est ni diriger une entreprise, ni considérer qu’une majorité se fait qu’avec ceux et celles qui pensent la même chose. Les 2 candidats ont beaucoup à apprendre, comme tout le monde sans doute, de la démocratie. Elle en peut s’organiser par quelques apparatchik et appareils parisiens.
La stratégie des 2 candidats et de leur entourage nous conduit dans l’inconnu dans laquelle la catastrophe n’est pas à exclure.
Alors pour nous, citoyens, nous reconnaissant dans une gauche réformiste et progressiste, que décider ?
Je voudrais citer Boris Cyrulnik « Le choix nécessite un travail de doute. Je dois peser le pour et le contre, hésiter, lire et rencontrer afin qu’un jugement s’établisse dans mon for intérieur. Pour être capable de décider, il ne faut pas systématiquement s’opposer ou se soumettre. Tout choix est difficile, car la pensée paresseuse, automatique et reflexe consiste à choisir son camp, ce qui évite les débats et préparer les combats contre ceux qui ont fait l’autre choix. Le doute est le premier pas vers la liberté… »[1]
Débattre oui, me soumettre non.
Très concrètement, il est probable au regard de la situation, connue à ce jour, que je donne ma voix à Emmanuel Macron, pour la présidentielle, pas uniquement par défaut. Son projet Européen, et un certain nombre de propositions vont dans le sens de l’idée que je me fais du progrès et du progressisme, même si d’autres sont très contestables comme je l’ai écrit sur ce blog.
Mais il est aussi vraisemblable qu’aux législatives, je vote pour le candidat présenté par le Parti Socialiste. Le candidat en question est Maire de la commune où j’habite. Il est jeune. Ce sera son premier mandat. Il a montré au travers sa responsabilité de maire et de Président de rennes métropole, sa capacité à répondre aux besoins des habitants tout en affichant un fort attachement à l’intérêt général. Durant le mandat de François hollande, il ne s’est pas rangé du côté des frondeurs. Ce n’est certainement pas sur un candidat sorti de nulle part, présenté par En Marche, que ma voix se portera.
Par ce choix, je reste convaincu de rester fidèle à mes engagements, malgré la contradiction apparente. Je ne serais pas le seul dans ma circonscription à faire le même choix et cette situation va se répéter des milliers de fois sur le territoire national.
C’est un appel à toutes celles et à tous ceux, qui se reconnaissent dans une gauche réformatrice et progressiste, à résister aux logiques d’affrontement que nous proposent depuis quelques jours les 2 candidats et leur états major, et qui ne fait que fracturer cette gauche de plus en plus chaque jour.
Gaby BONNAND
[1] Boris CYRULNIK Ivres paradis, bonheurs héroïques Odile Jacob