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Au-delà du profond renouvellement de l'Assemblée Nationale produit à l'occasion des élections législatives, l'initiative d’Emmanuel Macron et ce qu'elle a commencé à générer, a fait exploser le système politique français, dans son organisation comme dans l’approche de la politique

La victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle et de LREM aux législatives jouent comme un révélateur de l'inadéquation réelle depuis longtemps, entre la représentation politique et la société.

Cette inadéquation ne concerne pas seulement la sphère politique. La sphère sociale et syndicale est largement concernée.

Les formes de représentations Politiques, Sociales et Syndicales, en crise plus ou moins avancée, selon les organisations, se sont construites puis structurées et stabilisées au cours d'une période qui s’étend du début du 19° siècle à la fin des années 1970. Après une longue période de combat (dans la clandestinité pour les organisations syndicales et associatives), afin d’être reconnues, les organisations sociales, syndicales et politiques se sont progressivement structurées pour atteindre à la fin des années 1970 leur maturité à l’apogée de la société salariale dont elles sont à la fois le produit et le levier de sa structuration.

La société salariale au sens où Robert Castel la définit, entraîne dans sa déstabilisation la déstabilisation des organisations qui l’on structuré.

La relative homogénéité du salariat permise par une économie de rattrapage et de reconstruction d’après-guerre, a commencé à éclater au milieu des années 1970, sous les coups conjugués de l’internationalisation des économies, des nouvelles techniques de l’information et de communication, des révolutions conservatrices venues des Etats-Unis et du Royaume-Uni, de la révolution numérique…. Les conséquences sur le corps social et ses formes de représentation sont énormes. De nombreuses catégories sociales, pourtant en fort développement (CDD, Intérim, temps partiel, chômeurs, jeunes en difficulté d’insertion, seniors licenciés, autoentrepreneurs, salariés des TPE ou de startup…) sont devenues presque invisibles dans l’espace public.

Nombreux parmi ces travailleurs, ne se sentent pas représentés par les organisations sociales, syndicales et politiques issues de ce monde industriel qui s’estompe. Les promesses des organisations restées ou supposés très ancrées dans le noyau dur du salariat, consistant à dire que l’acquisition de droits et de garanties pour ce salariat, finira par s’appliquer à tous les travailleurs, ne fait plus illusion.

Dans ces conditions, défendre les corps intermédiaires comme acteurs participant à la construction de l’intérêt général, devient compliqué et peut parfois apparaître comme relevant de la foi du charbonnier. La plupart de ces organisations ne défendent que des intérêts particuliers ou des rentes de situation, en habillant ce corporatisme d’un discours de pseudo-solidarité.

Comme certains économistes ultralibéraux nous font croire que l’enrichissement des plus riches est une bonne chose pour tout le monde, (du fait de ce qu’ils appellent « la théorie du ruissellement »), les corporatistes pseudo- solidaires, nous font croire que la défense de leurs acquis et l’obtention de nouveaux pour eux-mêmes, finira par ruisseler sur l’ensemble. Et c’est ainsi que, le débat juridique sur la hiérarchie des normes, entre autre, (pourtant fondamentalement intéressant), qui ne va pas tarder à reprendre, est devenu la caution intellectuelle, presque scientifique au service d’une défense corporatiste.

Dans un tel contexte, il n’est pas compliqué pour des gouvernants de faire passer l’idée que seul l’Etat à autorité pour défendre l’intérêt général.

Si en face d’eux, ces derniers, n’ont que des défenseurs d’intérêts particuliers, comment s’étonner d’un renforcement du pouvoir politique et étatique ?

Il est difficile, en effet de s’inquiéter d’un risque du renforcement du poids de l’Etat, et de refuser en même temps, l’exercice d’une responsabilité qui consiste à se décaler de la défense des intérêts particuliers, pour entrer dans une démarche de confrontation et de négociation dans la perspective de construire ensemble, par des compromis, des garanties nouvelles qui concernent tout le monde.

Les semaines et les mois prochains vont être difficiles, notamment pour la CFDT.

Elle devra affronter à la fois une coalition de néo corporatistes « dits de gauche », et une volonté manifeste d’un certain nombre, parmi les gouvernants, de ne voir dans les corps intermédiaires que des corporatismes pour mieux s’en passer, dans la construction de réponses sociales et sociétales.

La bataille sera rude car les places à défendre sont nombreuses, les lobbies puissants, la rhétorique pseudo révolutionnaire bien rodée, la rhétorique néo-conservatrice sur le poids des charges, de la dette, des assistés, de la règlementation bien ancrée.

Pourtant l’espoir est permis. Ce qui s’est passé au plan politique, montre l’intérêt de nombreux citoyens et citoyennes, non engagés dans des partis traditionnels, à prendre part à la construction démocratique de notre pays. Cette volonté est forte également sur le plan social et syndical.

Fort de son analyse, de ses efforts de transformations internes, de ses nouvelles implantations dans des nouvelles couches de travailleurs, de ses derniers résultats aux élections professionnelles, la CFDT peut fédérer autour d’elles de nombreuses forces qui ne demandent qu’à participer à la construction de l’avenir.

De la capacité à capter ce désir, cette envie, dépendra une capacité d’écrire collectivement l’avenir.

Je suis convaincu que la CFDT a une place centrale à tenir dans cette formidable aventure et je sais qu’elle la tiendra.

Gaby BONNAND

Tag(s) : #Démocratie, #Démocratie sociale, #corporatisme, #politique, #Travail
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