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Billet d’humeur

Le MEDEF le retour dans le  giron de la négociation?

Le 13 avril dernier j'ai exprimé ma colère et mon incompréhension après la sortie de Roux de Bézieux qui appelait à l'augmentation de la durée du travail, à l’abolition des 35h, au renoncement à des jours de congé, bref à refaire redémarrer l'économie comme si il ne s'était rien passé depuis le 16 mars.

Du président de la République aux organisations syndicales, une désapprobation unanime avait accueilli son discours. Et c'est tant mieux.

Entre ceux qui disent qu'il faut recommencer comme avant et ceux qui, bien confinés dans leur confort de stars ou autre statuts qui leur ont fait paser la période sans aucune conséquences ni sur leur revenu, ni sur leur niveau de vie, nous inventent un avenir hors sol, il y a la réalité qui oblige ceux qui ont des responsabilités à sortir de la théorie et de l'idéologie pour affronter le réel.

Et je dois dire que de ce point de vue, l'interview que Roux de Bézieux accordé au monde daté du 14 Mai, est d'une autre nature que sa sortie du 12 Avril.

Le patron du Medef semble redécouvrir qu’une organisation patronale doit être autre chose qu’un simple lobby au service des intérêts particuliers des actionnaires et dirigeants de grandes entreprises.

L’hirondelle, ne fait certes pas le printemps. Mais il faut tout de même noter le changement de discours du patron du MEDEF.

A la question de savoir s'il faut augmenter la durée du travail, Roux de Bézieux répond que la question ne se pose pas de manière générale, que la situation est différente selon les entreprises et les secteurs d’activité. De toute façon précise-t-il, cette question « ne peut être traitée qu’avec les salariés et entreprise par entreprise. ». Voilà qui ressemble fort à un appel à l’importance de mettre le dialogue social au cœur de la reprise économique, et des mesures à prendre pour cela.

Pour Le patron des patrons, la reprise ne peut se faire que progressivement et dans le cadre du dialogue social qu’il qualifie "d'intense" dans la période. Il semble, en quelques jours, avoir pris conscience de la situation « Si on assiste à des phénomènes d’appauvrissement collectif, il y aura évidemment des tensions sociales »

Appelant à un investissement massif  pour ne pas sacrifier une génération, il considère que les licenciements représentent la dernière extrémité et qu’il faut d’ailleurs maintenir le dispositif du chômage partiel jusqu’à l’été et non pas jusqu’au 1° Juin, comme l’envisage le gouvernement.

Concernant les questions environnementales, le Patron du MEDEF appelle à la création d’une « taxe carbone à mettre en œuvre aux frontières de l’Union Européenne », pour permettre à l’industrie de se décarboniser sans se faire laminer par la concurrence de produits venant de pays ne respectant pas les normes environnementales. 

Sur les relocalisations, la position est aussi en évolution puisque Roux de Bézieux reconnait que la crise a montré « qu’on est parfois allé trop loin dans certains secteurs stratégiques », indiquant également que cela était également vrai à l’intérieur de certaines entreprises. Cette prise de conscience va jusqu’à faire dire au patron des patrons que ces stratégies ont finalement des couts.

Bien sûr il considère que si on est allé aussi loin ce n’est pas la faute des entreprises qui finalement, si on lit entre les lignes, n’ont fait que suivre la volonté des clients qui n’ont de cesse de vouloir tout acheter moins cher.

Ceci étant, l’évolution de la position du MEDEF sur l’environnement et les stratégies des entreprises, est à relever car elle replace l’organisation comme un acteur de la négociation sociale qui doit porter également sur la stratégie des entreprises et leur responsabilité sociale et environnementale.

Voilà un ensemble de propos qui ressemblent d’avantage à ceux d’une organisation qui se sent concernée par l’avenir du pays qu’au propos d’une organisation lobbyiste soucieuse des intérêts des actionnaires et dirigeants auxquels nous avait habitué le MEDEF depuis un certain temps.

Je sais, on va me traiter de naïf qui croit encore aux discours du MEDEF qui ne sont que des paroles pour endormir le peuple.

Mais que tous ceux et toutes celles qui pensent cela, sachent que je préfère être naïf  que de croire à un monde de demain sans patron, peuplé d’hommes et de femmes libres et solidaires, qui émergerait soudainement par simple pensée et volonté de quelques avant-gardistes éclairés.

A cette illusion je préfère être naïf au point de croire que le monde de demain se fera par la confrontation et la négociation entre les acteurs aux logiques et intérêts différents qui constituent le monde d’aujourd’hui.

De ce point de vue, la reconnaissance par le MEDEF que le monde est traversé par des logiques différentes (« Le redémarrage de la production ne peut pas intervenir contre les salarié, s’ils ont peur, ça ne peut pas marcher »), peut être vu comme le retour du MEDEF dans le giron des acteurs de la négociation, après un long temps durant lequel il avait semblé déserter ce rôle. Et c'est tant mieux

 

Gaby BONNAND

Tag(s) : #Economie, #Démocratie sociale, #MEDEF, #Covid19
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