L'offensive du gouvernement pour défendre sa réforme repose sur 2 arguments:
1- La réforme est une réforme de justice sociale
2- La réforme sauve le système par répartition
1- La Réforme est une réforme de justice sociale
Gilles Finchelstein, Secrétaire de la fondation Jean Jaurès a eu ce matin dans l'émission de Ali Baddou, "Le grand face à face", une expression très juste pour caractériser la réforme des retraites présentée par le gouvernement : "C'est une réforme injuste dans laquelle, il y a des mesures justes". C'est une expression que je trouve très intéressante car elle met l'accent sur la différence entre ce qu'est un compromis gagnant/gagnant et une réforme unilatérale qui octroie quelques compensations. Dans un compromis digne de ce nom, un compromis qui participe à l'approfondissement de la démocratie, il n'y a aucune mesure inacceptable pour les parties concernées, dans un contexte donné.
Très clairement, "les mesures d'amortissement pour rendre la réforme moins brutale" ne peuvent pas être considérées comme de nature à établir un compromis équilibré.
Les tableaux ci-dessous montent concrètement qui sera touché le plus par le report de l'age de la retraite, à partir d'une seule question : qui verra son temps de retraite raccourci par la réforme? Les tableaux sont très claires.
Dans un conteste de renforcement des inégalités, cette réforme va encore les aggraver.
Non cette réforme n'est pas juste. Même avec des mesures de compensation, elle n'endigue pas la logique inégalitaire de la réforme et au delà de la logique économique à l'oeuvre.
2- Cette réforme sauve le système de répartition.
La répartition n'est pas seulement une technique, c'est une philosophie qui repose sur la solidarité. Solidarité entre actifs et retraites, solidarité entre malades et bien portants, solidarité ente jeunes et vieux… La répartition est l’expression d’un choix sociétal qui fait de la solidarité entre les individus, la pierre angulaire de la vie en société, quand la capitalisation est l'affirmation de la responsabilité première de l’individu dans la prise en charge des risques qui le toucheront.
Oui, je suis attaché à la répartition. Oui nous avons besoin d’une réforme qui vienne non pas sauver le système par répartition, mais le renforcer, le rende plus attrayant.
Aujourd'hui, nous ne nous trouvons pas dans une situation d’urgence absolue. Après une année excédentaire d’environ 1 Milliards €, 2022 prolongera cette dynamique avec un excédent d'environ 3 milliards €.
Est-ce pour autant une situation durable ? Non c'est une situation fragile qui nécessite une réforme qui renforce la répartition. Mais cette situation aurait dû permettre une autre démarche dans l’élaboration de la réforme. Encore faut-il que les gouvernants aient une réelle conception d’une démocratie qui repose sur le dialogue et la négociation avec les corps intermédiaires. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, et la réforme proposée est à l’image de cette conception d’une démocratie verticale qui n’a de vision des réalités que par des moyennes.
Cette réforme ne sauve donc pas la répartition. Par contre je pense qu’elle lui donne une image « sacrificielle ». Le risque c’est que cette réforme déconsidère un peu plus la répartition dans un contexte où tout ce qui est collectif est considéré comme une charge qui entrave l’initiative individuelle.
Gaby Bonnand
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