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Ce blog est un espace d'expression. Il a pour ambition de s'inscrire dans le débat politique, social et sociétal. "Ouvertures" signifie que le débat y est possible dans le respect des valeurs qui président à des débats démocratiques: écoute, respect des individus, sincérité ... C'est un espace dans lequel tous et toutes sont invités à s'exprimer. c'est par le débat que les idées progressent et s'enrichissent. Pour ceux et celles qui le souhaitent, il est possible de s'abonner, en suivant les indications sous la rubrique "s'abonner", situé à la droite de l'article.

la rémunération des actionnaires augmente de 30% en 1 an. Indi CATEUR et Indi VIDU se retrouvent à nouveau.

Indi CATEUR et Indi VIDU ( 2° épisode)

Indi VIDU : La semaine dernière tu me disais que la situation était grave parce que les prix baissaient ainsi que la production industrielle. Tu peux me dire si c’est grave quand la rémunération des actionnaires des grandes entreprises françaises progresse de 30% en 1 an.

Indi CATEUR : C’est plus compliqué que ça, tu sais. Beaucoup de grandes entreprises françaises ont fait appel à des fonds d’investissement pour se financer. Ces fonds sont le plus souvent étrangers et exigent des taux de rentabilité importants pour « gratifier » leurs actionnaires.

Indi VIDU : N’empêche qu’en Allemagne, c’est pas comme ça. Je crois que la rémunération des actionnaires n’a progressé que de 3,9%, sur la même période.

Indi CATEUR : C’est pas pareil, les entreprises allemandes font moins appel aux fonds d’investissements. Elles ont plus de fonds propres. En clair elles s’autofinancent. Par ailleurs elles font moins appel à des capitaux étrangers demandeurs de très fortes rétributions. Elles ont donc moins de dividendes à distribuer.

Indi VIDU : Pourquoi, les entreprises françaises ne font pas la même chose ?

Indi CATEUR : Le capitalisme français se rapproche de plus en plus de la logique anglo-saxonne qui mise sur une rentabilité financière de court terme pour attirer les actionnaires. Le capitalisme allemand mise d’avantage sur l’investissement productif, parfois moins rentable à court terme mais ça a l’avantage de présenter plus de stabilité dans la durée, y compris pour les actionnaires.

Indi VIDU : Si je te comprends bien, les entreprises françaises distribuent des dividendes de plus en plus importants aux actionnaires et les entreprises allemandes, elles investissent une partie de la richesse créée dans leur appareil productif pour le maintenir en état et le faire évoluer.

Indi CATEUR : En gros c’est ça. C’est en partie ce qui explique que l’appareil productif allemand se porte mieux que l’appareil productif français.

Indi VIDU : Pourtant l’autre jour tu me disais que la production industrielle a baissé aussi en Allemagne. Donc au fond ça ne change rien.

Indi CATEUR : Ne mélange pas tout. L’appareil productif et la production industrielle ce n’est pas la même chose.

Indi VIDU : Je mélange toujours tout avec toi. Je constate simplement que l’Allemagne qui rémunère moins les actionnaires connait aussi une baisse de la production.

Indi CATEUR : OK, mais je vais prendre un exemple. Tu prends 2 jardiniers. L’un a des outils en très bon état. Il a profité de ses petites récoltes annuelles qui lui ont fait économiser des achats de légumes en grandes surfaces, pour changer ses outils usagés. L’autre n’a pas changé ses outils depuis longtemps. Il a eu de moins bonnes récoltes, son terrain est moins bien travaillé. Mais il a tout de même un peu économisé en achat de légumes. Avec ces économies, il a fait autre chose. Il n’a pas fait le choix de renouveler ses outils. Cette année les jardins de nos 2 jardiniers ont été saccagés par un orage de grêle. Ni l’un ni l’autre n’ont eu de récoltes. Tu me suis ?

Indi VIDU : Oui et alors ?

Indi CATEUR : Et bien celui qui avait des outils tout neufs, dès le lendemain de l’orage, il a retravaillé son jardin et il a fait des plantations et des semis. L’autre avec ses outils pourris, il n’a rien pu faire. Si tu voyais les jardins. Il y en a un qui ressemble à une friche et l’autre il est magnifique. Tu comprends maintenant ?

Indi VIDU : Je commence à comprendre, mais quel rapport avec l’Allemagne et la France.

Indi CATEUR : Et bien la France et l’Allemagne, ou du moins la production allemande et la production française ont connu toutes les 2 une baisse, car la consommation est insuffisante. C’est un peu l’orage de grêle sur les jardins. Mais quand la demande va repartir, les allemands auront un appareil de production en bon état car ils auront investi pour le renouveler. C’est comme le jardinier qui renouvelle ses outils. En France ce ne sera pas le cas. Les entreprises françaises risquent encore de manquer le rendez-vous, car elles auront fait le choix de distribuer des dividendes plutôt que d’investir.

Indi VIDU : Je vois, mais y a un truc qui me chiffonne. Hier j’ai vu un reportage à la télé, aux infos de 20 Heure sur France 2. Il disait que nous vivons une période de surconsommation. En fait, nous consommons trop au niveau mondial. Il parait même, du moins c’est ce que le reportage disait, qu’hier, 19 Août, nous avions consommé, depuis le début de l’année, la totalité de ce que nous aurions dû consommer dans l’année, si nous voulons que les choses se renouvellent sur la planète. Et toi tu me dis que c’est important qu’on investisse dans notre appareil productif pour que nous puissions répondre à une demande de consommation. Si on est en surconsommation, à quoi ça sert de produire encore.

Indi CATEUR : Tu as l’art de poser des questions compliquées.

Indi VIDU : Non ce n’est pas compliqué. C’est toi qui est compliqué ou du moins tes explications. L’autre jour tu m’expliques que si je veux retrouver du travail, j’ai intérêt à ce que la production industrielle reparte. Aujourd’hui tu me dis que le choix des allemands d’investir dans l’appareil productif est plus intéressant que celui des français qui distribuent des dividendes, car la consommation va reprendre. Et si je reprends ton équation de l’autre jour, cette nouvelle consommation va entraîner une nouvelle production et cette nouvelle production va générer des emplois et que peut-être je trouverais du boulot ! Je suis prêt à te croire, mais j’entends que nous consommons déjà trop au niveau mondial. Ma question est simple : Comment tu peux m’expliquer qu’il faut une croissance forte pour recréer des emplois et dans le même temps moins consommer pour préserver la planète ? C’est quoi qui est compliqué la dedans ?

Indi CATEUR : C’est pas compliqué quand tu poses la question. Ce qui est compliqué c’est l’économie. La gestion de l’économie c’est compliquée.

Indi VIDU : Je veux bien croire que l’économie c’est compliquée. Mais tout de même on ne peut pas en permanence passer son temps à résoudre des équations les unes après les autres. C’est ça qui complique les choses. On veut résoudre un problème de croissance, alors on pousse à la consommation. Quand on est parvenu à résoudre cette équation, tout le monde semble content mais il y en a une autre à résoudre : Trop de consommation ravage la planète…

Indi CATEUR : Tu vois bien que c’est compliqué

Indi VIDU : Laisse-moi finir. Peut-être qu’il y a trop de consommation mondiale. Mais, il y en a qui doivent consommer beaucoup pendant que d’autres se serrent la ceinture. Je ne vais pas me plaindre par rapport à des gens de pays très pauvres. Mais moi je fais partis de ces français qui ne peuvent plus partir en vacance. Je n’ai plus les moyens. Alors quand j’entends que des actionnaires ont eu plus de 30% de rémunération entre Juin 2013 et Juin 2014, ça me fout les boules.

Indi CATEUR : Bien sûr. Mais on ne peut pas tout simplifier à coup de baguettes magiques.

Indi VIDU : Je ne demande pas cela. Je sais que les choses sont complexes. Et c’est parce que les choses sont complexes qu’on ne peut pas en rester à la résolution d’équations économiques. Par exemple, il y a des besoins qui ne sont pas satisfaits aujourd’hui. Et si on y répondait, ça ne nuirait pas à la planète. Moi par exemple, j’ai une maison. Rien n’est isolé. Je dépense un fric fou pour me chauffer. Mais je ne peux pas faire de travaux. J’ai pas les moyens. Et combien dans mon cas. On pourrait prendre d’autres exemples. Est-ce qu’on ne pourrait pas développer des activités qui ne ravagent pas la planète, qui la préservent même, mais qui répondent à des besoins, et qui en plus créraient des emplois..

Indi CATEUR : Si, bien sûr, mais il faut quand même être réaliste. Pour développer des activités nouvelles qui répondent à des besoins et qui ne ravagent pas la planète, il faut des investissements. Pour investir, il faut des moyens et les caisses de l’Etat sont au plus bas. Je te rappelle que nous avons un déficit public de près de 2 000 Milliards.

Indi VIDU : Arrête de me parler de ces chiffres. Je me rends même pas compte de ce que ça veut dire. Déjà les 30% d’augmentation de la rémunération des actionnaires qui représentent 40 Milliards, j’ai du mal à me rendre compte, alors 2 000 Milliards, j’te dis pas.

Indi CATEUR : Oui mais c’est la réalité.

Indi VIDU : La réalité c’est que bien que la production industrielle baisse, il y a création de richesse, puisque les grandes entreprises ont distribué 40 Milliards à leurs actionnaires. En fait la richesse produite ne va qu’à quelques-uns. C’est ça aussi la réalité.

Indi CATEUR : Alors tu fais quoi ? Tu supprimes les actionnaires ?

Indi VIDU : Je n’ai jamais dit cela. Je comprends bien qu’il faille rémunérer les actionnaires. Personne n’investit à perte. Mais à un tel niveau, on est plus dans de la rémunération, on est dans de la captation de richesse par une minorité qui semble dicter sa loi aux politiques.

Indi CATEUR : Ça y’est la théorie du complot. Toi aussi tu crois à cela?

Indi VIDU : Absolument pas. Mais alors pas du tout. Je crois simplement que la vie en société c’est aussi une histoire de rapport de force. Aujourd’hui, nous sommes dans un rapport de force qui est favorable à ceux qui croient que seul l’appât du gain peut dynamiser l’économie de marché à faire les bons choix d’investissements dans les bons secteurs d’activité, pour répondre aux besoins. Bien que cette logique nous ait conduit dans le mur avec la crise de 2008, cette croyance est encore bien présente. Pourtant le système inspiré de cette logique est un échec dans l’organisation de la vie en société, aussi cuisant que le communisme en Union soviétique et ailleurs,

Indi CATEUR : Tu n’y vas pas de mains morte toi au moins. Ni communisme, ni économie de marché. Alors c’est quoi ta solution ?

Indi VIDU : D’abord tu devrais m’écouter quand je parle et pas me faire dire ce que je ne dis pas. Je n’ai jamais dit que j’étais contre l’économie de marché. J’ai dit que je n’étais pas d’accord avec ceux qui prétendent que seul l’appât du gain est un moteur efficace pour le fonctionnement de cette économie.

Indi CATEUR : Ok mais qu’est-ce que tu proposes ?

Indi VIDU : Je ne sais pas trop, mais est-ce complètement idiot de penser qu’on pourrait redistribuer autrement la richesse ? Sans négliger les actionnaires, on pourrait utiliser une partie à des investissements, à la formation des salariés, à la protection sociale. On pourrait même l’utiliser pour investir dans des secteurs où il y a des besoins et dont leur développement ne détruirait pas la planète.

Indi CATEUR : Alors tu veux tout nationaliser pour que l’Etat décide tout

Indi VIDU : Qu’est-ce que tu racontes. Je ne veux pas nationaliser. On a besoins des entreprises pour développer tous ces secteurs. Je dis qu’on peut orienter les investissements des entreprises par une fiscalité adaptée, et s'appuyer sur le dialogue social et environnemental pour faire des choix plus avisés.

Indi CATEUR : Tu veux mettre les entreprises sous tutelle de l’Etat et des syndicats?

Indi VIDU : Vraiment c’est dur à se faire comprendre. Je ne mets personne sous tutelle. Mais la politique d’un pays ne se résume pas à faire fonctionner le marché. J’espère qu’il n’est pas complètement stupide de penser que la politique c’est aussi de travailler à ce que les gens puissent vivre en société, aujourd’hui et demain. Pour cela est-il utopiste de penser que les politiques fiscales puissent privilégier ceux qui réinvestissent la richesse créée en direction de la protection sociale, de la formation, du développement de nouvelles activités qui ne détruisent pas la planète… ?

Indi CATEUR : C’est bien ce que je disais. Tu contrains les entreprises.

Indi VIDU : Alors pour toi, donner des aides aux entreprises qui paient leurs salariés au SMIC, c’est normal, mais aider les entreprises en fonction de la manière dont elles réinvestissent la richesse créée, c’est une contrainte ?

Indi CATEUR : Les entreprises ne sont pas aidées quand elles paient leurs salariés au SMIC, elles sont aidées pour embaucher des salariés non qualifiés tout en les payant au minimum au SMIC.

Indi VIDU : Tu me fais rire. Moi j’ai un BTS commercial et j’ai rarement été payé plus que le SMIC dans les entreprises où j’ai travaillé. Ton explication, elle a peut-être fonctionné mais il y a longtemps que ça ne marche plus. C'est aussi pour avoir une idée plus juste de ce qui se passe dans les entreprises qu'il faut s'appuyer sur le dialogue avec les syndicats et les consommateurs. Car j'espère que ce n'est pas stupide de penser que l'entreprise ce n'est pas seulement les actionnaires et les patrons, mais aussi les salariés et les consommateurs.

Indi CATEUR : ben dis donc, on ne peut pas dire que tu sois à court d'arguments. Il faudra continuer nos échanges.

Indi VIDU : Ça serait étonnant qu’il n’y ait pas d’autres chiffres à sortir dans les prochains jours. On se retrouve à ce moment-là.

Indi CATEUR : Ok ; A plus.

Gaby BONNAND

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M
Chapeau et merci pour ce dialogue d'une économie expliquée par l'intermédiaire de ce dialogue entre indicateur et individu : expliquer, rendre compréhensible autant que possible des choses compliquées c'est bien -à mon sens- contribuer au bien commun.(avec la chronique du "Monde" de Stéphane Lauer du 25/04 sur la "profitflation" je crois qu'il y a de quoi faire !)
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