Quels voeux pour 2024?

9 Janvier 2024

Il y a comme un certain malaise à exprimer des vœux en ce début d'année 2024. Le sentiment qui domine quand on regarde le monde de manière très générale, est celui d’une régression généralisée.

Sur le plan national l'année 2023 a été marquée par une réforme des retraites injuste et brutale, la mise en œuvre de mesures restrictives en matière de droits des chômeurs, et pour finir l'année une loi sur l'immigration qui de l'aveu même du Président de la République, comporte beaucoup de mesures anticonstitutionnelles.

Sur le plan international, les 2 conflits les plus médiatisés que sont la guerre que Poutine mène contre l'Ukraine qui s’installe dans la durée, et la guerre que mène Israël contre le Hamas à Gaza après le pogrom du 7 octobre et qui tue des milliers de palestiniens innocents, sont des conflits qui en occultent bien d’autres à travers le monde.

Sur le plan international encore où l'attrait pour les régimes autoritaires progresse, en même temps que la démocratie semble reculer. Les perspectives annoncées concernant tant les résultats aux élections européennes que celles aux États-Unis, semblent corroborer cette impression d’un recul de la démocratie.

A cela ajoutons encore la substitution de la mouvance « nationalisme révolutionnaire » qui a suivi la période immédiate postcoloniale structurant pour partie le mouvement des non-aligné, (dans un monde plus facile à décrypter et à analyser et certainement pas meilleur qu’aujourd’hui), qui a progressivement disparu après la chute du mur de Berlin, par la mouvance "nationalisme religieux", (dans un monde où les grilles de lecture d’hier sont totalement obsolètes), qui fait des émules dans de nombreux pays.

C'est ce que l'on voit de haut et de loin. Le danger de ce seul regard, celui que nous donne chaque jour les chaînes d'info en continue, les réseaux sociaux, ou autres médias à la recherche du scoop pour vendre leur produit, consiste à ne donner à voir que les grands reliefs. Ils ont pour effet d’engendrer des réponses aussi générales que le regard est général , souvent décalée des réalités.

Une « vue d’ensemble » doit toujours être complétée par « des vues de détails » pour reprendre une expression qu’on emploie en technologie industrielle ou de construction, pour envisager le travail à réaliser.

Et justement, si nous regardons le monde à hauteur d’hommes et de femmes, il est beaucoup plus divers et notre approche plus complexe.

Je suis toujours frappé, là d'où je parle, engagé dans le monde associatif, par le nombre d'initiatives citoyennes qui se développent dans de nombreux domaines sur les territoires. Elles mobilisent des jeunes et des moins jeunes dans la création des espaces de solidarité entre habitants, des espaces de création permettant à des gens de s'exprimer par la peinture, l'écriture, la création ou la rénovation d'objets, la musique, le chant, la photo...

Elles mobilisent des citoyens dans l'accueil des migrants, dans la lutte contre l'exclusion et la pauvreté, dans le soutien aux femmes victimes de violence, dans l'aide au logement, dans l'accompagnement des personnes seules ou en difficultés passagères, dans le domaine du soutien scolaire, et aussi sur des projets de solidarité internationale…

Je constate aussi de plus en plus de jeunes et de moins jeunes qui cherchent à donner du sens à leur travail, qui veulent un travail utile pour les autres, pour la société. De nombreuses enquêtes et études ces dernières années confirment cette vitalité, même si les formes d'engagement ont évolué. Cet engagement conduit certains à se lancer dans l'entreprenariat solidaire, d’autres dans des missions ponctuelles dans des associations…

Ce soucis d'un travail utile et d'un travail dans lequel chacun et chacune veut se réaliser, entraîne aussi un renouvellement de contenu revendicatif porté par les syndicats. L'accent est mis sur la qualité ; qualité du service rendu ou du produit réalisé, qualité des conditions et de l'organisation du travail, qualité de l’environnement, qualité des relations de travail, qualité du dialogue social.

« La vue de détail » ne supprime pas « la vue d’ensemble », pas plus que « la vue d’ensemble » n'annule la « vue de détail ». Il est impossible d’agir de manière durable et de façon constructive sans articuler les 2 approches.

Pourtant dans cette période, lorsqu’on regarde la vue d’ensemble, on se décourage, quand on regarde la vue de détail, il y a de quoi s’enthousiasmer.

Assurément, le regard d’une seule vue entraîne de l’excès dans nos attitudes.

Ni découragement anesthésiant, ni enthousiasme naïf. Ni refus de voir des dangers qui se profilent, ni négligence du dynamisme peu médiatisé des forces vives. Voilà mes vœux pour 2024 pour continuer à être des acteurs indispensables à la Démocratie

Gaby Bonnand