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Surtaxation des CDD de courte durée, une idée plébiscitée par des économistes de renom.

Dans le monde daté du 2 Novembre 2017,  2 tribunes d’économistes de renom, l’une signée par Jean Tirole et Olivier Blanchard, l’autre par Jean Pisani Ferry et Philippe Martin. Les 2 premiers consacrent leur tribune au Bonus-Malus envisagé dans le cadre de la réforme de l’assurance chômage, pour en noter tout l’intérêt. Ils mettent l’accent sur l’importance de responsabiliser les entreprises et à ne pas faire supporter les mauvais comportements par les plus vertueux, en matière de recrutement et « d’employabilité ».

Quant aux 2 autres, ils abordent ce sujet dans leur tribune consacrée à la politique économique du gouvernement et à « ce qu’elle doit faire pour les classe populaires et moyennes ».

Les 4 économistes ventent les mérites de cette proposition de Bonus-Malus. Ils considèrent que cette mesure devrait contribuer à freiner le recours au CDD et favoriser les recrutements en CDI.

Au-delà du bonus-malus, ce qui est intéressant dans les 2 tribunes, ce sont les arguments. Les 4 économistes mettent l'accent sur la responsabilisation​ des entreprises dans le recours massif aux contrats courts. Elles doivent être responsabiliser et inciter à revoir leur comportement.
Pour Tirole et Blanchard, " Ceux qui se comportent bien ne doivent pas payer pour ceux qui se comportent mal" et le Bonus-Malus « favorisera les secteurs créant des emplois stables et incitera les entreprises à garder leurs salariés"
Pour Pisani et Martin, le Bonus-Malus doit s'accompagner "d'un plan massif d'investissement dans les compétences". Pour eux  avec les réformes de l’assurance chômage et de la formation professionnelle, « l’enjeu est de construire un système qui participe à l’égalité des chances, modernise la gouvernance des entreprises et donne confiance »  

Ce débat sur la responsabilisation des entreprises dans la recrudescence des embauches en CDD  de très courte durée n'est pas nouveau. Il a alimenté de nombreuses discutions et donné lieu à de nombreuses propositions pour surtaxer les CDD, au cours des négociations pluriannuelles de ces dernières années. Propositions toujours rejetées par le patronat. En effet, le recours aux CDD de courte durée n’est pas nouveau. Lors de la négociation de 2010, la CFDT rappelait que le nombre de salariés recrutés en CDD de moins de un mois était passé de 5, 6 millions en 2000 à 12 millions 2010, alors qu’en 2010 le nombre de création nette d’emplois est 3 fois moins important qu’en 2000[1].

Il ne s’agissait pas pour la CFDT de dénoncer une situation, juste pour dénoncer. Pour elle, « Cette situation alimentait un processus de précarisation au détriment des qualifications »[2]

Que des économistes de renom, fassent aujourd’hui ce constat pour soutenir une action visant la réduction des CDD de courte durée, est très important.

Un des outils préconisé pour mener cette bataille est la mise en œuvre d’un Bonus-Malus. Si l’idée de surtaxer les CDD de courte durée est intéressante, je ne suis pas certain que le Bonus-Malus soit le remède le plus efficace au regard du fonctionnement en réseau des entreprises. Nous le savons ce fonctionnement permet très souvent aux grosses entreprises donneuses d’ordre, d’externaliser un certain nombre de contraintes sur leurs sous-traitants.

Une surtaxation  des CDD de courte durée ne sera-t-elle pas détournée par les grandes entreprises et toutes les entreprises donneuses d’ordre, en sous-traitant les contraintes de très grande flexibilité sur les sous-traitants, eux-mêmes,  qui sont le plus fréquemment des petites et moyennes entreprises ?

Ne serait-il pas plus judicieux d’instaurer une cotisation patronale dégressive, en fonction de la durée du contrat ? Cette proposition a été avancée par la CFDT dans des négociations précédentes. Les risques d’externaliser les contraintes sont moins forts, puisqu’au moment de l’embauche toutes les entreprises seraient soumises au même taux de cotisation. La dégressivité se trouverait être un encouragement à garder le salarié. Plus la durée du contrat sera longue, moins les cotisations seront fortes. A contrario, plus le turn-over sera important, plus le coût sera élevé. L’inconvénient de cette mesure est le renchérissement important de la cotisation lors de l’embauche. Mais si l’objectif, comme le développent les 4 économistes, est de favoriser les CDI et les qualifications, ce handicap de départ est surmontable dans la durée.

Souhaitons que le débat qui va s’ouvrir débouche sur des solutions qui enrayent cette prolifération dangereuse des CDD de très courte durée.

Gaby BONNAND

 

 

[1] Pôle emploi « De quoi je me mêle » P 132 et 133. Gaby Bonnand Edition de l’atelier

[2] Déjà cité P 133

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